mercredi 9 août 2017

DECENTRALISATION n'est pas DECONCENTRATION.



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Le Président de la NOUVELLE AQUITAINE, publie ce 8 aout un point de vue qui mérite attention. Faire de la décentralisation, la mère de toutes les réformes ! Sous la plume d’une fin connaisseur de la gestion locale, rompu de longue date aux grands équilibres politiciens le propos est édifiant.  Il aurait pu être tenu par le président des Hauts de France !
Dans un pays jacobin comme le nôtre, les pouvoirs et compétences accordés aux collectivités locales, le sont toujours avec réticence et ce qui génère des doublons néfastes aux deniers publics. De fait la distinction entre déconcentration et décentralisation, qui a nourrit la réflexion de générations d’étudiants en droit public reste à trancher !
Il va falloir aller au bout d’une logique que la modernité commande, et que les réussites locales confortent. Pour preuve la montée en charge de PÔLES TERRITORIAUX de COOPÉRATION ÉCONOMIQUE (PTCE) et la mesure ici ou là de performances palpables, en termes d’emplois, de maillage des territoires et d’innovations. L’analyse de terrain montre qu’en dépit d’une réelle bonne volonté des services de l’État, c’est en proximité la région qui est le meilleur moteur et le partenaire le plus efficace pour dynamiser et accompagner les initiatives.
Ce constat doit conduire à s’interroger sur l’impact du territoire sur la croissance économique, pour lever toutes les entraves administratives et permettre aux régions de piloter cette mutation.
Il faut savoir que le cadre législatif et réglementaire existe, il faut simplement vouloir aller au bout de la logique du bon vieux principe de subsidiarité et se souvenir de l’article 2 de la charte Européenne de l’autonomie locale qui dispose que l’autonomie d’une collectivité locale implique pour celle-ci de pouvoir régler et gérer, dans le cadre de la loi et sous sa responsabilité, au profit de sa population une part importante des affaires publiques.
Avec notamment le nouveau découpage régional et dans une moindre mesure les lois MAPTAM instituant les métropoles, et NOTRE (pour Nouvelle organisation territoriale de la République), le cadre national est en place, il est inutile de légiférer de nouveau, bornons-nous a appliquer !
Appliquer en identifiant, comme pointé par les études sur les PTCE menées par le LABO de l’ESS, les ingrédients du succès.
Il importe d’abord de renforcer le rôle pivot des régions en indiquant clairement que l’État et ses services n’ont plus à intervenir ni à évoquer des pans entiers de politique économique et sociale. Cela passe dans le même temps, par une autre question d’actualité la remise à plat de la fiscalité locale, avec la vieille règle du « qui lève l’impôt le dépense » et enfin par une identification précise des spécificités territoriales et des blocs communaux
Nous sommes donc bien au-delà de la déconcentration car il s’agit bien de compétences fortes totalement transférées, en particulier aux régions. Cela ira de pair avec un pouvoir normatif donné à ces collectivités et l’affirmation d’un vrai poids directeur des schémas régionaux. Schémas qui, en proximité, doivent identifier les spécificités des territoires communaux et des « pays ».
Une vraie décentralisation, disposant des textes en vigueur, peut donner des résultats tangibles dans les domaines qui font le quotidien, la culture, l’éducation, l’environnement, enfin et surtout le développement économique. Sur ce dernier volet, en 2012, La Cour des Comptes pointait, 22 dispositifs différents de soutien aux entreprises !
C’est le signe évident d’une décentralisation inachevée, et d’un gisement d’économies disponibles en moyens humains et matériels. Cela implique réflexion.

R HASSELMANN

dimanche 6 août 2017

REGRESSION DEMOCRATIQUE!



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Le titre est emprunté à un ouvrage collectif, "L'âge de la régression" (Premier Parallèle éd.) qui s'inscrit, à maints égards, dans l'actualité politique et sociale du moment.
Des politologues et philosophes étrangers (Allemands et Scandinaves notamment) se livrent à une analyse pointant les dangers qui menacent notre civilisation du fait de l'ingérence, de plus en plus prégnante, de l'intelligence artificielle (IA). L'ouvrage tombe à pic au moment ou M. Zuckerberg et E. Musk s'opposent sur ce thème. E. Musk, que l'on ne peut pas taxer de ringard, tire la sonnette d'alarme estimant que l'IA menace notre civilisation et qu'il est urgent de mettre en oeuvre une régulation préventive et proactive de cette technologie.
De fait, nous sommes en pleine actualité nationale, au moment où une enquête du JDD se penche sur la question du "vote sous influence" et/ou, des militants s'insurgent contre le déficit de démocratie interne de leur mouvement. Actualité encore quand un grand nombre de citoyens s'interrogent sur la force et la légitimité d'un recours aux ordonnances quand il s'agit de toucher au Code du travail. Actualité toujours quand la représentation nationale se sent dépossédée des vrais choix au profit d'une technostructure administrative choisie et non élue.
Convenons qu'il s'agit là d'une vraie question, que la loi de moralisation de la démocratie devrait pointer. Sommes-nous prêts à considérer le citoyen comme un client qu'il convient de séduire après avoir identifié ses attentes et les moteurs de ses choix, avec l'aide de moteurs de recherches et de données stockées chez des tiers du genre GAFA ?
C'est à l'évidence, l'orientation prise quand on sait les méthodes mises en oeuvre lors des dernières consultations électorales. Il s'est agi à cette occasion de bien cerner les particularismes locaux et les typologies de comportements et de consommation du citoyen électeur dans chacune des circonscriptions pour adapter le message en conséquence et y donner aux "représentants de terrain" les bons mots et les bonnes images à servir. On connaît la suite, une grande partie de ces représentants a été élue à l'Assemblée nationale, faisant de celle-ci une sorte d'association de consommateurs, inféodée aux spécialistes du markéting qui ont conçu et packagé les produits à faire avaler.
Ce constat peut ne pas être partagé, mais il faut admettre que nous sommes loin d'Aristote ou de R. Boudon qui rêvait d'un citoyen impartial élu pour prendre les bonnes mesures. Comme le souligne avec justesse le livre évoqué supra, cette dérive n'est pas neutre. Elle va faire, à terme, de chaque individu, une donnée numérisée qui pourra être influencée ou manipulée par des algorithmes, prompts à identifier faiblesses et appétences.
Le lecteur me dira qu'ainsi va le monde et qu'il est rétrograde de vouloir en museler la marche. Sans doute, mais encore faut-il que le plus grand nombre soit conscient de la tendance et l'accepte sans équivoque. À cet égard, il faut avoir lu les travaux de G. King, l'un des papes des sciences sociales pilotées par algorithmes pour se convaincre des dangers. En effet, au train où vont les choses, les apprentis sorciers vont devoir accepter une IA autonome qui apprendra seule et dont la connaissance et la perception du monde passeront par des sentiers que l'humain ignore et qui peuvent nous être fatals.
Une telle hypothèse ne relève pas de la fiction et commande de toute urgence une réflexion nationale. Dès l'instant où certains ont mis le doigt dans l'engrenage pour servir leurs ambitions électorales personnelles, en foulant au pied l'esprit de la vraie démocratie et du cadre constitutionnel, il faut prendre acte, en parler et revoir les règles du jeu démocratique !